Samedi matin.
Je m'étais réveillé de très bonne heure malgré l'heure tardive à laquelle je m'étais couché puis endormi la veille. Lorsque j'avais ouvert les yeux, il faisait toujours sombre dans ma chambre, alors que mon cadran indiquait tout de même six heures et demie. Le ciel devait être gris-rose à ce moment-là, pas noir... Un peu confus, je m'étais redressé en position assise, et j'avais compris: les rideaux n'étaient pas tirés. J'avais laissé s'échapper un "Tsst" bref et peu audible en me mordant la lèvre inférieure.

- Iago ! avais-je ensuite appelé.

Normalement, il entrait dans ma chambre vers cinq heures pour rendre visible le paysage par la fenêtre. J'avais l'habitude de me lever en même temps que le jour. Mais cette fois, les toiles qui couvraient les ouvertures étaient toujours en place, et mon serviteur n'avait pas répondu à mon appel.

- IAGO ! avais-je finit par hurler.

Toujours pas de réponse. Ainsi, cette Myriam avait bel et bien réussi à l'attirer dans ses filets ? Iago avait encore une fois désobéi à mon ordre en se faufilant à l'extérieur dès que le sommeil m'avait gagné ?

- Rima !

Rima n'avait pas tardé à se montrer dans la pièce suite à ma convocation. Elle était l'une des nombreuses servantes employées par mon démon pour s'occuper des tâches ménagères, de la cuisine, et tout le tralala. Je lui avais demandé de m'apporter mes vêtements et un peu de nourriture que je gobai en quelques secondes. Puis, à ma requête, elle m'avait conduit dans un grand centre commercial avant de retourner au manoir.

Et voilà que je me promenais dans les allées du centre, observant sans intérêt les jouets pour enfants et les jeux vidéos disposés dans les vitrines. Je ne m'amusais pas avec ce genre de trucs. En fait, moi même parfois j'avais du mal à cerner ce qui me divertissait. Je me lassais toujours trop rapidement de tout. Ainsi, j'errais sans but réel. Ou peut-être avais-je pour objectif de me perdre, ou bien me faire enlever pour de vrai ? Iago voulait mon âme. S'il m'arrivait quelque chose avant que notre contrat ne puisse atteindre ses fins, pourrait-il toujours absorber ce qui m'est le plus cher ? Certes, je n'étais pas prêt à mourir maintenant, et s'il m'arrivait quelque chose j'étais sûr que mon démon viendrait à ma rescousse. Mais si je trouvais le moyen de lui faire réellement peur, de sorte qu'il n'ose plus me quitter sans permission...

Des idées de toute sorte déferlaient dans ma tête. Je pourrais monter au deuxième étage et m'apprêter à sauter par la fenêtre. Je pourrais aussi demander mon chemin à un type hyper louche. Ou encore, je pourrais subtiliser un couteau dans le coin des restaurants et me faire saigner les poignets à mort... Rien que pour le déranger et l'obliger à quitter Myriam pour accourir à mes côtés. Vraiment, j'étais en train de penser à tout. Jusqu'à ce que soudainement, je me retrouvai dos au sol, sans même pouvoir réaliser comment j'en fus arrivé là. Une femme à la poitrine abondante - ben ouais, ses seins couvraient mon champ de vision >< - se trouvait au-dessus de moi. Elle semblait avoir trébuché en même temps que moi. À cause de moi, même, parce qu'elle me cracha à la figure:

- Putain ! Lèves toi ! J’me ferais pas chopper a cause de toi bordel et je veux ce foutu collier !

Elle tirait effectivement sur un accessoire qui s'était pris dans les chaînes de mon propre collier. Vu sa panique, elle fuyait quelque chose. Sans doute les policiers qui approchaient à grands pas.

Les policiers.

Que ferait Iago si je me faisais arrêter ?

Je ne bougeai pas d'un poil.

- On dit s'il-vous-plaît, dis-je simplement.

Je ne pensai pas à l'insulter ou quoi que ce soit. Je ne pensais qu'à mon idée.

[enchantée monsieur Phantomhive ]

« On dit, bouge ton cul crétin ! »

Il était petit et fluet, quel dommage pour lui, vraiment. Voyons, comment le prendre…Par l’oreille ? Les cheveux ? Ou lui arracher sa chaine ? Tellement d’option qui s’offrait a moi. Nous laisser prendre ? Oh tentant ! J’écrasais sa mise d’un regard dédaigneux avant de renifler, méprisante.

« Y a fallu que je tombe sur un gosse de riche…et bé…j’aurais mieux fait d’aller m’pendre ce matin moi… »

Je jetais un coup d’œil habilement mêlé de panique a de l’effronterie derrière moi, Voyons, j’avais 5 minutes grâce a la plante verte derrière la quelle on s’était vautrés. Enfin, derrière laquelle je l’avais percuté.

« Evidemment, monsieur compte sur son gentil papounet pour le sortir de là… »

Continuais je en revenant vers lui tout en tripotant le collier avec brusquerie. Mmmh…De loin, il était intéressant, de prêt, beaucoup plus. C’était un stéréotype dans son genre mais il avait fallut qu’il ai un truc en plus. Une âme tout a fait alléchante. Mais je ne devais pas oublier le caniche qui le suivait partout normalement, donc, il me fallait faire vite ou changer de plan en court de route. A vrai dire, tout cela m’amusait grandement !

Et puis je me figeais, sentant l’un des gardes juste derrière la plante verte. Je plaquais ma main sur la bouche du gamin, simulant le stress et la peur a merveille, tout en essayant de jeter un coup d’œil entre les feuilles. Chose que je n’avais pas besoin de faire puisque le dit garde puait l’oignon a quinze mètre au moins. Mais il me fallait faire attention a ne pas trop inquiéter le gosse, auquel cas, j’aurais un double problème sur le dos.

Ce n’était que la mise en bouche et j’étais curieuse de voir jusqu’où irait ce cher ange. Je ne m’inquiétais pas pour moi, j’avais assez de tour dans mes poches, mais pour le moment, l’instant se voulait tendu, intérieurement, je riais.

« Gueule et je t’arrache ce qui te sert de feuille de choux ! »

Deux contre un qu’il ferait le contraire. Je l’imaginais bien me mordre la main pour lâcher un hurlement strident. Je ne sais pas vraiment ce qu’il cherchait, mais cela pourrait s’avérer payant. Restait a savoir si je faisais preuve de patience ou non. Tout était une question de choix. Et les miens, je les faisais toujours au bon moment. Mais je calculais très bien mon attitude, bravache et en même temps vulnérable. Un étrange contraste que je rendais parfaitement bien.

Panique et assurance. Juste une fille des rues frondeuse et perdue. Mes doigts tiraillaient toujours sur la chaine, les autres tenaient fermement la grande bouche du gamin.

Voyons ces prochaines cartes.

[Han, j'ai été démasquée ♥ MDR, pour la peine j'te fous un faux espoir, ma réponse sera pas pour tout de suite xDD Hey jviens de voir que le collier était censé être emmêlé aux mailles de mon pull et non à mon propre collier... désolée :/ ]

L'inconnue n'usa pas tant de politesse à mon égard. Elle m'ordonna de "bouger mon cul" avant de me traiter de "crétin". Apparemment, elle fulminait. Crétin elle-même. Comment pouvais-je bouger un seul membre alors qu'elle était quasi à cheval sur moi, m'écrasant de son corps aux formes volumineuses ? Pendant qu'elle se mit à marmonner des paroles sans importance, je baissai innocemment les yeux sur nos deux colliers. Le mien était épais et chromé. Le sien, composé de petites perles, semblait beaucoup plus fragile. Je crus bon de la prévenir avec assurance.

- Si tu continues à tirer comme ça, ce n'....... mmh-hhm.... mmmh !

Avant même que je puisse la voir venir, la main délicate de l'étrangère vint se coller sur mes lèvres, m'empêchant de sortir quoi que ce soit d'intelligible. Elle appuyait de plus en plus fort, étouffant ma voix, et m'étouffant en même temps. Ses ongles de femme, longs et pointus, s'enfonçaient dans la chair de mes joues. Je commençai à me débattre, soudainement pris de panique. Alors c'était ça, se sentir physiquement prisonnier, être incapable de riposter ?

-Gueule et je t’arrache ce qui te sert de feuille de choux ! gueula celle qui ne voulait pas m'entendre gueuler.

Je me débattis un court moment encore avant de m'immobiliser complètement.

Calme-toi, Ciel. Calme-toi.

Je fermai les paupières un instant, me concentrant sur le très peu d'air que mon agresseur me laissait pour respirer. Je ne sais pas si elle s'en rendait compte, mais elle couvrait à moitié mes narines en même temps que ma bouche. Ce n'était pas bon pour moi, ça. Vraiment pas bon.

Ce qui était bien - j'étais donc en danger.

Je finis par entendre des pas non loin de nous. Juste dans le dos de la fille, en fait. Que devais-je faire, maintenant ? Hum. Pour m'avoir rentré dedans ainsi, pour m'avoir insulté et pour me retenir au sol comme elle le faisait, laissez-moi vous dire qu'elle méritait amplement de se faire repérer. Je pourrais sortir en douce le crayon dans la poche de mon jean et le lancer en direction des autorités. Mais... si je laissais l'attaquante se faire arrêter par la police, adieu mes chances de partir avec elle dans l'endroit sombre où vivent les voleurs mal habillés comme elle.

Je ne fis donc rien jusqu'à ce que la police s'éloigne de nous. Une fois cela fait, j'agrippai ma main au poignet de l'autre au-dessus de moi et j'appliquai une petit force pour qu'elle comprenne qu'elle pouvait me laisser vivre, maintenant.

Tout ça pour un misérable collier ? Wow. Le monde d'aujourd'hui ne sait plus comment donner de la valeur aux bonnes choses.