Littérature québécoise: Mort de Nelly Arcan
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Littérature québécoise: Mort de Nelly Arcan
Littérature québécoise: Mort de Nelly Arcan
(Source: Radio-Canada) La maison d'édition Coups de tête annonce la mort de l'écrivaine québécoise Nelly Arcan, 35 ans, qui s'était rendue célèbre pour son roman Putain.
On apprend que l'écrivaine québécoise Nelly Arcan a perdu la vie à Montréal dans la nuit de jeudi à vendredi. La maison d'édition Coups de tête a confirmé la triste nouvelle dans un communiqué, puis dans une entrevue, sans s'appesantir sur les circonstances du décès.
La jeune femme était âgée de 35 ans et avait fait sa marque pour ses romans à la facture originale ainsi que pour sa plume introspective et lapidaire. Dans ses livres, elle évoquait la souffrance et le tourment, mais aussi la rage de vivre. Ses écrits exploraient entre autres la complexité de l'identité féminine et du rapport au corps, à la beauté et à la jeunesse. Elle collaborait aussi à des émissions littéraires à la télévision et au journal hebdomadaire ICI.
En 2007, elle fait paraître L'enfant dans le miroir chez Le marchand de feuilles. Le livre, illustré de dessins à l'encre de Chine, est présenté par l'éditeur comme un « conte cruel pour jeunes filles ». Le sujet de l'identité féminine est une fois encore au coeur de cet ouvrage, où il est question de la représentation de soi et du rapport intime à son propre corps. L'anorexie et la chirurgie plastique sont abordées, dans le cadre de cette histoire fantastique, parsemée de personnages imaginaires, qui se déroule dans des forêts de miroirs.
Née à Lac-Mégantic, en Estrie, Nelly Arcan, de son vrai nom Isabelle Fortier, venait de terminer l'écriture du roman Paradis clef en main, qui devait bientôt paraître aux éditions Coups de tête.
Notre article sur Folle au moment de la sortie du livre.
Voyez aussi l'extrait des Archives, Nelly Arcan fait sensation à Paris
www.radio-canada.ca avec Presse canadienne
(Source: Radio-Canada) La maison d'édition Coups de tête annonce la mort de l'écrivaine québécoise Nelly Arcan, 35 ans, qui s'était rendue célèbre pour son roman Putain.
On apprend que l'écrivaine québécoise Nelly Arcan a perdu la vie à Montréal dans la nuit de jeudi à vendredi. La maison d'édition Coups de tête a confirmé la triste nouvelle dans un communiqué, puis dans une entrevue, sans s'appesantir sur les circonstances du décès.
La jeune femme était âgée de 35 ans et avait fait sa marque pour ses romans à la facture originale ainsi que pour sa plume introspective et lapidaire. Dans ses livres, elle évoquait la souffrance et le tourment, mais aussi la rage de vivre. Ses écrits exploraient entre autres la complexité de l'identité féminine et du rapport au corps, à la beauté et à la jeunesse. Elle collaborait aussi à des émissions littéraires à la télévision et au journal hebdomadaire ICI.
En 2007, elle fait paraître L'enfant dans le miroir chez Le marchand de feuilles. Le livre, illustré de dessins à l'encre de Chine, est présenté par l'éditeur comme un « conte cruel pour jeunes filles ». Le sujet de l'identité féminine est une fois encore au coeur de cet ouvrage, où il est question de la représentation de soi et du rapport intime à son propre corps. L'anorexie et la chirurgie plastique sont abordées, dans le cadre de cette histoire fantastique, parsemée de personnages imaginaires, qui se déroule dans des forêts de miroirs.
Née à Lac-Mégantic, en Estrie, Nelly Arcan, de son vrai nom Isabelle Fortier, venait de terminer l'écriture du roman Paradis clef en main, qui devait bientôt paraître aux éditions Coups de tête.
Notre article sur Folle au moment de la sortie du livre.
Voyez aussi l'extrait des Archives, Nelly Arcan fait sensation à Paris
www.radio-canada.ca avec Presse canadienne
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scorpy- Admin
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Re: Littérature québécoise: Mort de Nelly Arcan
:shock: je n'ai jamais lu ses livres mais je la connaissait bien apres l'avoir vu bon nombres de fois soit a la télé québecoise ou a tv5 ainsi que rfo cé jeune en maudit mourir a cet âge là. R.I.P NELLY ARCAN. bien hâte de savoir la raison de sa mort. :scratch:
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Re: Littérature québécoise: Mort de Nelly Arcan
:silent: triste mais p-e y aura t-il enquête car étant une ancienne call-girl peut-être aurait-elle eu des menaces car dans ses livres elle parlait bcp de ce " métier ". :scratch:
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scorpy- Admin
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Re: Littérature québécoise: Mort de Nelly Arcan
lettre d'un ex sur son blog: http://www.vulusu.ca/archives/1396
Re: Littérature québécoise: Mort de Nelly Arcan
le suicide toujours triste et jamais on ne sais pas les vraies raison qui poussent les gens à l'acte extrême et qui laissent tout les proches dans le doute et le questionnages. ça doit être terrible pour une personne ne pas savoir comment se sortir du trou dans lequel elle se trouve ni de savoir comment s'en sortir ou d'en parler pour que quelqu'un comprenne à temps.
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scorpy- Admin
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Re: Littérature québécoise: Mort de Nelly Arcan
ces dont ben triste et il y a rien a faire dans ces cas la
katry- Messages: 2901
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Re: Littérature québécoise: Mort de Nelly Arcan
SUICIDE
Nelly Arcan est morte
Moins de douze heures après la découverte du corps inanimé de Nelly Arcan dans sa résidence de la rue St-Dominique, le Service de police de la ville de Montréal (SPVM) confirme que cette dernière se serait finalement enlevé la vie.
Contactée en fin d’avant-midi vendredi, la porte-parole du SPVM, Anie Lemieux a expliqué à 24H que «le dossier est traité comme un suicide».
Pas d'enquête criminelle
Comme il s’agit d’un suicide, le SPVM n’enquêtera de manière approfondie pas sur l’affaire. «Comme dans tous les événements du genre, rien n’indique que c’est criminel», explique Anie Lemieux.
Quant aux circonstances entourant le décès de la femme de 34 ans, elles demeurent toujours inconnues pour l’instant.
«Ce n’est pas une enquête policière criminelle par respect pour les gens impliqués», termine la porte-parole du service de police.
Dans la majorité des cas de suicide, c’est la famille de la personne décédée qui transmet une demande au bureau du coroner afin qu’une autopsie soit pratiquée sur le corps.
Impossible de savoir si une telle demande a été formulée vendredi.
Un dernier roman
L'auteure venait de terminer l'écriture de son dernier roman, Paradis clef en main, qui devait bientôt paraître aux Éditions Coups de tête.
Nelly Arcan, de son vrai nom Isabelle Fortier, est née en 1975 à Lac-Mégantic, en Estrie.
Elle s'était fait connaître grâce à ses romans Putain, Folle et À ciel ouvert. Son roman Putain lui avait valu une nomination pour les prix Médicis et Femina, deux prix littéraires français.
Elle était aussi chroniqueuse pour le cahier ICI publié dans le journal 24H.
Sa dernière chronique, publiée vendredi, s'intitule «Ça vaut le détour».
Nelly Arcan est morte
Moins de douze heures après la découverte du corps inanimé de Nelly Arcan dans sa résidence de la rue St-Dominique, le Service de police de la ville de Montréal (SPVM) confirme que cette dernière se serait finalement enlevé la vie.
Contactée en fin d’avant-midi vendredi, la porte-parole du SPVM, Anie Lemieux a expliqué à 24H que «le dossier est traité comme un suicide».
Pas d'enquête criminelle
Comme il s’agit d’un suicide, le SPVM n’enquêtera de manière approfondie pas sur l’affaire. «Comme dans tous les événements du genre, rien n’indique que c’est criminel», explique Anie Lemieux.
Quant aux circonstances entourant le décès de la femme de 34 ans, elles demeurent toujours inconnues pour l’instant.
«Ce n’est pas une enquête policière criminelle par respect pour les gens impliqués», termine la porte-parole du service de police.
Dans la majorité des cas de suicide, c’est la famille de la personne décédée qui transmet une demande au bureau du coroner afin qu’une autopsie soit pratiquée sur le corps.
Impossible de savoir si une telle demande a été formulée vendredi.
Un dernier roman
L'auteure venait de terminer l'écriture de son dernier roman, Paradis clef en main, qui devait bientôt paraître aux Éditions Coups de tête.
Nelly Arcan, de son vrai nom Isabelle Fortier, est née en 1975 à Lac-Mégantic, en Estrie.
Elle s'était fait connaître grâce à ses romans Putain, Folle et À ciel ouvert. Son roman Putain lui avait valu une nomination pour les prix Médicis et Femina, deux prix littéraires français.
Elle était aussi chroniqueuse pour le cahier ICI publié dans le journal 24H.
Sa dernière chronique, publiée vendredi, s'intitule «Ça vaut le détour».
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scorpy- Admin
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Re: Littérature québécoise: Mort de Nelly Arcan
Ça vaut le détour
Nelly Arcan
Quand il s’agit d’odeurs, c’est souvent le cas. Je veux dire, le large détour qui vaut la peine. En particulier dans le cas des mauvaises.
Se promenant d’un pas léger sur l’avenue Coloniale, direction nord, lors de cette splendide journée (ô surprise, ô bénédiction) à laquelle nous avons eu droit lundi dernier, et un rien affectées, je dois le dire, par l’absorption d’un pichet de sangria sur une terrasse offerte au soleil cuisant, mon amie et moi, on étaient guillerettes, contentes, bavardes. On s’en allait chez elle où un apéro suivi d’un repas d’huîtres nous attendaient, son copain et un copain de son copain en prime. La vie était belle.
Puis, m’empoignant le bras d’un geste sec, l’humeur soudain sombre, comme si elle venait de se souvenir d’un événement pénible, elle m’a poussée de force vers l’est, puis à nouveau vers le nord, puis vers l’ouest, et enfin vers le sud. On s’est enfin arrêtées devant son appartement, non sans avoir fait un détour de plusieurs centaines de mètres. Weird.
« C’était quoi, ça ? Un traitement choc contre la joie de vivre ? Une façon d’éliminer les effets de l’alcool ?
- Pas du tout. C’était plutôt pour éviter les haut-le-cœur, les risques de vomissement, la perte éventuel-le d’appétit. »
Et elle de m’expliquer ce qui, depuis des années, lui pollue la vie. Ce qui la déprime chroniquement. Ce qui aggrave son quotidien : l’odeur de morue séchée, avariée, accumulée, sédimentée, tricotée aux murs intérieurs et extérieurs, aux planchers, aux plafonds, de chez Beneito, l’épicerie portugaise du coin. Aucun lien entre l’origine ethnique et l’odeur de l’épicerie. Disons simplement que l’épicerie sent funky et ce, à distance. Monstrueusement.
« Ça sent la vieille morue compostée. Ça sent la pourriture mêlée aux désinfectants, comme dans les hôpitaux. Ça sent la mort. L’odeur traîne partout dans les environs et mon appartement se trouve, pour mon malheur, dans ces mêmes environs. J’ai tenté de m’y habituer, mais, avec le temps, c’est devenu pire. Si par mégarde je sens cet odeur-là le matin, en allant travailler, ça me gâche la journée. Le soir venu, je ne veux pas rentrer. Une perte totale de jouissance, quoi.
- Tant que ça ? Pire que l’odeur de patchouli ? » Regard de travers de mon amie qui n’a pas apprécié que je ne la prenne pas au sérieux. Quand j’ai abordé le sujet pendant le dîner, entre deux huîtres, dans le bruit de succion des bouches aspirant les mollusques morveux, son copain m’a rappelée à l’ordre, les yeux méchants : « On mange. »
Mais ma curiosité était piquée. Pendant la soirée, je suis sortie dehors, j’ai prétendu vouloir prendre l’air en fumant une clope, mais j’ai plutôt marché en direction de l’épicerie. J’étais à dix mètres, et j’ai tout compris. Je me suis acharnée, je suis passée devant l’entrée pour mieux renifler. Les huîtres, dans mon estomac, se sont révoltées.
Y’a pas à dire, chez Beneito, ça sent la mort passée à l’eau de javel. Il faut y envoyer des inspecteurs. Au PC.
Mais comment est-ce possible? N’existe-t-il pas des lois prévues contre les mauvaises odeurs ? Contre la cacophonie olfactive, le chaos odorant engendré par l’urbanité, la condensation humaine ?
La mémoire
Rien ne stimule plus la mémoire que les odeurs. C’est ce qu’on dit, que les odeurs seraient de petites machines organiques à remonter dans le temps.
C’est une question de proximité géographique dans le cerveau. Par exemple, on capte l’odeur si particulière des bonbons blancs aux rayures rouges de nos grands-mères, ceux qui collent les uns aux autres pour former une masse de sucre visqueuse et indivisible, et on revoit en flashback l’image nette, précise, d’un salon, d’un divan brun, d’un tapis vert, d’un piano, de portraits accrochés aux murs en contreplaqués, imitation bois. On se rappelle même l’heure indiquée sur l’horloge ronde, au-dessus du poêle : 12h15.
Ou encore l’odeur terreuse d’un marécage qui nous rappelle le jour maudit où, en enfant téméraire et désobéissant, on s’était enlisé dans la boue jusqu’aux genoux, laissant derrière soi, non sans avoir livré au préalable une lutte contre la matière glaiseuse dans laquelle ses bottes à tuyau sont restées prisonnières, pour ensuite rentrer à la maison « nus bas », en larmes, provoquant la colère de sa mère, par nature ennemie jurée de toutes les formes de saleté.
La tolérance
Je pense à une lecture : Le Parfum de Patrick Suskind. C’est l’un des romans les plus connus au monde. Il y est écrit que, si un Occidental d’aujourd’hui était catapulté au Moyen Âge, à Paris, il tomberait immédiatement dans les pommes. À cause des odeurs des marchés : viandes rouges plus ou moins faisandées, poissons plus ou moins frais, fromages bleus devenus verts, qui se déplacent tout seuls, macération des déchets jetés n’importe où, le tout à ciel ouvert, sans normes d’hygiène, sans rien, au naturel.
De nos jours, on mourrait sur place, foudroyés par l’écœurement, pour beaucoup moins. Évolution ou dénaturation ?
Pas capable de le sentir
Je ne vous parlerai pas des phéromones, ces prétendues particules odorantes, subtiles, indétectables, scientifiquement douteuses, qui détermineraient le choix des partenaires sexuels.
Mais du fait que notre propre odeur, quelle qu’elle soit, est non seulement supportable mais toujours agréable. On y baigne comme dans son salon. Odeurs vinaigrées de transpiration dans un autobus, odeurs de flatulences bien grasses devant la télévision, odeurs de chaussures sport champignonnées et mal aérées dans un vestiaire. Pas de problèmes. Ces odeurs sont comme des extensions de soi, de son « moi », de sa vérité profonde, de son propre ego.
Or, ces mêmes odeurs, chez quelqu’un d’autre, sont intolérables. On ne s’y accommode pas. Elles sont une agression, une atteinte à l’intégrité.
Le pire, c’est qu’il n’y a rien de plus difficile que d’apprendre à quelqu’un qu’il pue. On se montre incapable de provoquer la honte d’autrui.
Beaucoup de relations « interpersonnelles » se sont détériorées ainsi, à cause de malentendus, de non-dits olfactifs. Qui laissent toujours cet arrière-goût... indécrottable.
Nelly Arcan
Quand il s’agit d’odeurs, c’est souvent le cas. Je veux dire, le large détour qui vaut la peine. En particulier dans le cas des mauvaises.
Se promenant d’un pas léger sur l’avenue Coloniale, direction nord, lors de cette splendide journée (ô surprise, ô bénédiction) à laquelle nous avons eu droit lundi dernier, et un rien affectées, je dois le dire, par l’absorption d’un pichet de sangria sur une terrasse offerte au soleil cuisant, mon amie et moi, on étaient guillerettes, contentes, bavardes. On s’en allait chez elle où un apéro suivi d’un repas d’huîtres nous attendaient, son copain et un copain de son copain en prime. La vie était belle.
Puis, m’empoignant le bras d’un geste sec, l’humeur soudain sombre, comme si elle venait de se souvenir d’un événement pénible, elle m’a poussée de force vers l’est, puis à nouveau vers le nord, puis vers l’ouest, et enfin vers le sud. On s’est enfin arrêtées devant son appartement, non sans avoir fait un détour de plusieurs centaines de mètres. Weird.
« C’était quoi, ça ? Un traitement choc contre la joie de vivre ? Une façon d’éliminer les effets de l’alcool ?
- Pas du tout. C’était plutôt pour éviter les haut-le-cœur, les risques de vomissement, la perte éventuel-le d’appétit. »
Et elle de m’expliquer ce qui, depuis des années, lui pollue la vie. Ce qui la déprime chroniquement. Ce qui aggrave son quotidien : l’odeur de morue séchée, avariée, accumulée, sédimentée, tricotée aux murs intérieurs et extérieurs, aux planchers, aux plafonds, de chez Beneito, l’épicerie portugaise du coin. Aucun lien entre l’origine ethnique et l’odeur de l’épicerie. Disons simplement que l’épicerie sent funky et ce, à distance. Monstrueusement.
« Ça sent la vieille morue compostée. Ça sent la pourriture mêlée aux désinfectants, comme dans les hôpitaux. Ça sent la mort. L’odeur traîne partout dans les environs et mon appartement se trouve, pour mon malheur, dans ces mêmes environs. J’ai tenté de m’y habituer, mais, avec le temps, c’est devenu pire. Si par mégarde je sens cet odeur-là le matin, en allant travailler, ça me gâche la journée. Le soir venu, je ne veux pas rentrer. Une perte totale de jouissance, quoi.
- Tant que ça ? Pire que l’odeur de patchouli ? » Regard de travers de mon amie qui n’a pas apprécié que je ne la prenne pas au sérieux. Quand j’ai abordé le sujet pendant le dîner, entre deux huîtres, dans le bruit de succion des bouches aspirant les mollusques morveux, son copain m’a rappelée à l’ordre, les yeux méchants : « On mange. »
Mais ma curiosité était piquée. Pendant la soirée, je suis sortie dehors, j’ai prétendu vouloir prendre l’air en fumant une clope, mais j’ai plutôt marché en direction de l’épicerie. J’étais à dix mètres, et j’ai tout compris. Je me suis acharnée, je suis passée devant l’entrée pour mieux renifler. Les huîtres, dans mon estomac, se sont révoltées.
Y’a pas à dire, chez Beneito, ça sent la mort passée à l’eau de javel. Il faut y envoyer des inspecteurs. Au PC.
Mais comment est-ce possible? N’existe-t-il pas des lois prévues contre les mauvaises odeurs ? Contre la cacophonie olfactive, le chaos odorant engendré par l’urbanité, la condensation humaine ?
La mémoire
Rien ne stimule plus la mémoire que les odeurs. C’est ce qu’on dit, que les odeurs seraient de petites machines organiques à remonter dans le temps.
C’est une question de proximité géographique dans le cerveau. Par exemple, on capte l’odeur si particulière des bonbons blancs aux rayures rouges de nos grands-mères, ceux qui collent les uns aux autres pour former une masse de sucre visqueuse et indivisible, et on revoit en flashback l’image nette, précise, d’un salon, d’un divan brun, d’un tapis vert, d’un piano, de portraits accrochés aux murs en contreplaqués, imitation bois. On se rappelle même l’heure indiquée sur l’horloge ronde, au-dessus du poêle : 12h15.
Ou encore l’odeur terreuse d’un marécage qui nous rappelle le jour maudit où, en enfant téméraire et désobéissant, on s’était enlisé dans la boue jusqu’aux genoux, laissant derrière soi, non sans avoir livré au préalable une lutte contre la matière glaiseuse dans laquelle ses bottes à tuyau sont restées prisonnières, pour ensuite rentrer à la maison « nus bas », en larmes, provoquant la colère de sa mère, par nature ennemie jurée de toutes les formes de saleté.
La tolérance
Je pense à une lecture : Le Parfum de Patrick Suskind. C’est l’un des romans les plus connus au monde. Il y est écrit que, si un Occidental d’aujourd’hui était catapulté au Moyen Âge, à Paris, il tomberait immédiatement dans les pommes. À cause des odeurs des marchés : viandes rouges plus ou moins faisandées, poissons plus ou moins frais, fromages bleus devenus verts, qui se déplacent tout seuls, macération des déchets jetés n’importe où, le tout à ciel ouvert, sans normes d’hygiène, sans rien, au naturel.
De nos jours, on mourrait sur place, foudroyés par l’écœurement, pour beaucoup moins. Évolution ou dénaturation ?
Pas capable de le sentir
Je ne vous parlerai pas des phéromones, ces prétendues particules odorantes, subtiles, indétectables, scientifiquement douteuses, qui détermineraient le choix des partenaires sexuels.
Mais du fait que notre propre odeur, quelle qu’elle soit, est non seulement supportable mais toujours agréable. On y baigne comme dans son salon. Odeurs vinaigrées de transpiration dans un autobus, odeurs de flatulences bien grasses devant la télévision, odeurs de chaussures sport champignonnées et mal aérées dans un vestiaire. Pas de problèmes. Ces odeurs sont comme des extensions de soi, de son « moi », de sa vérité profonde, de son propre ego.
Or, ces mêmes odeurs, chez quelqu’un d’autre, sont intolérables. On ne s’y accommode pas. Elles sont une agression, une atteinte à l’intégrité.
Le pire, c’est qu’il n’y a rien de plus difficile que d’apprendre à quelqu’un qu’il pue. On se montre incapable de provoquer la honte d’autrui.
Beaucoup de relations « interpersonnelles » se sont détériorées ainsi, à cause de malentendus, de non-dits olfactifs. Qui laissent toujours cet arrière-goût... indécrottable.
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